Comme vous l’aurez constaté, le nombre d’interruptions de trafic pour cause de travaux a significativement augmenté ces dernières années. A tel point que le mécontentement se fait de plus en plus entendre sur ce sujet : ces interruptions sont non seulement plus longues, mais bien plus fréquentes. Et donc suscitent désormais de la grogne. Par exemple, lors d’une réunion publique à laquelle nous avons assisté en début d’année, une élue s’est plainte que ces concitoyens « étaient assignés à résidence en soirée ».
Disons-le d’emblée : loin de nous l’idée de remettre en question le principe ni l’utilité des travaux menés sur notre ligne, tant le besoin est réel. Nous savons qu’ils ont un mal nécessaire. Et tout le monde reconnaît désormais que les infrastructures se sont dégradées au fil du temps, la faute alors à un entretien suffisant. Discours qui n’était pas tenu il n’y a pas si longtemps que cela…
Pour autant, comme vous, nous restons sur notre faim, tant :
- Nous ne comprenons pas pourquoi il n’est plus possible de maintenir un minimum de trafic, là où ceci était encore possible il y a quelques mois ;
- La communication est, n’ayons pas peur des mots, désastreuse à bien des égards.
A la veille d’une rencontre avec l’exécutif de SNCF réseau, et à quelques semaines du comité de ligne, voici un rapide tour d’horizon sur nos doléances.
Déjà dix ans de travaux, mais aucun bilan précis sur la période écoulée
Dès 2015, la SNCF, SNCF Réseau (qui s’appelait encore alors RFF) et IDFM (qui s’appelait alors encore le STIF), ont réuni élus et usagers. Il s’était alors agi d’expliquer que de nombreux chantiers étaient nécessaires. Et donc que de nombreuses interruptions de trafic seraient à prévoir, en fin de soirée et le week-end. Avaient par exemple été mis en avant la nécessaire mise en accessibilité des gares (et donc les rehaussements de quais), et diverses modernisations.
Avec, alors, une amélioration de la situation à prévoir « à partir du début des années 2020 ».
Maintenant que nous sommes entrés dans ce fameux « à partir du début des années 2020 », que constatons nous ?
- Aucun bilan ne nous a été présenté, ne serait-ce que pour récapituler :
- Ce qui était exhaustivement prévu ;
- Ce qui a été réalisé ;
- Ce qui ne l’a pas été, et surtout :
- Pourquoi SNCF Réseau n’a pas pu réaliser ledit chantier ;
- Ce qu’il aurait fallu pour que SNCF Réseau puisse le réaliser ;
- Pourquoi SNCF Réseau n’a pas pu réaliser ledit chantier ;
- Quelle était l’amélioration de ponctualité escomptée vs l'amélioration réellement constatée ?
- Ce qui était exhaustivement prévu ;
- Que les incidents liés aux infrastructures, malgré les travaux, semblent toujours aussi nombreux. Et se produisent toujours aussi souvent à certains endroits névralgiques de la ligne (la gare du Nord, pour ne pas la citer).
Nous n’avons pas l’impression de demander la lune. Pourtant, telle une grande muette, SNCF Réseau ne nous a fait aucun retour digne de ce nom.
Beaucoup de travaux certes, mais un flou total sur leur contenu et leur durée
Depuis bientôt un an et demi, la vitesse supérieure a été passée peut-être sur le nombre de chantiers, mais surtout aussi dans l’absence de communication détaillée sur le sujet. En effet :
- En soirée, c’est l’enfer pour revenir de Paris :
- Dernier train depuis Paris pour Melun à 22h39… avec des soirées pour lesquels le dernier train signalait à 21h39 (juin 2023) ;
- Dernier train depuis Paris pour Corbeil à 22h45 ;
- Dernier train depuis Paris pour le nord de la ligne à 23h (pour cette branche les travaux ont commencé il y a pratiquement une dizaine d’années maintenant) ;
- Dernier train depuis Paris pour Melun à 22h39… avec des soirées pour lesquels le dernier train signalait à 21h39 (juin 2023) ;
Et encore, tout cela à condition que le dernier train ne soit pas supprimé, ce qui arrive encore trop souvent. Ensuite, des bus de substitution sont mis en place. Mais alors le temps de trajet peut s’en trouver plus que doublé. Bref, une punition, tant la qualité du service est aléatoire. A titre de rappel, auparavant, il y avait souvent au moins un dernier train une heure plus tard.
- Le week-end, de nombreuses coupures totales, avec les mêmes conséquences, quand bus de substitution il y a (Cf. le "loupé" qui a fait qu'il n'y a eu aucun bus entre Corbeil et Malesherbes il y a quelques semaines) ;
- Mention spéciale enfin aux travaux inopinés de maintenance, qui ont lieu tous les jours en fin de matinée . L’usager les découvre systématiquement via une information trafic.
Et donc, depuis plus d’un an, toujours les mêmes questions :
- En quoi consistent précisément les travaux réalisés actuellement ?
- Pour chacun des chantiers, quelle est la date de début / date de fin prévisionnelle ? Ne serait-ce que pour savoir pour combien de temps nous devrons subir cette situation et nous assurer que les chantiers respectent bien leur planning ;
- En quoi les chantiers entraînent la fermeture totale de la ligne, alors que dans certains secteurs, les trains ont quatre voire 6 voies pour circuler ?
En n’ayant pour ainsi dire aucune réponse sur le sujet, nous constatons que l’acceptabilité des travaux commence à avoir du plomb dans l’aile. Et pas que sur notre ligne.
Et donc quid de la communication ?
C’est très simple : malgré le dispositif déployé pour alerter les voyageurs sur les travaux et bus de substitution, la direction de la ligne D nous a indiqué en juillet dernier que 2/3 des utilisateurs des bus de substitution indiquent ne pas avoir eu connaissance des travaux en amont de ceux-ci.
Il y a donc bien quelque chose qui ne va pas non plus sur l’information des voyageurs. Et là, quand nous demandons à la direction de la ligne D comment elle compte revoir sa copie, c’est silence radio. Pour dire, le jour où la SNCF nous a présenté ces chiffres, nous avons observé que les écrans en gare, l’application et les écrans grandes lignes à Gare de Lyon mentionnent bien les travaux… mais avec 3 horaires différentes pour le dernier ZACO. Encore une remontée sur laquelle ils ne nous ont fait aucun retour d’ailleurs …
Pour aller plus loin dans ce manque de vision du besoin du voyageur, nous avons à maintes reprises expliqué à la SNCF que le besoin du voyageur n’était pas d’être informé à la veille des travaux, mais bien plus en amont. C’est-à-dire au moins 3 mois.
Un exemple ? Ceux qui ne sont pas rancuniers de la qualité de service du RER D peuvent vouloir réserver des billets de trains « Grandes Lignes », mis en vente 3 mois à l’avance : le RER D offrant une connexion à la gare de Lyon ou à la Gare du Nord, il est théoriquement facile de rentrer chez soi.
Sauf que la SNCF n’a rien trouvé de mieux qu’envoyer des mails 2 semaines à l’avance pour indiquer : « votre ligne est coupée, anticipez votre trajet ». Ils n’ont juste pas compris que l’anticipation, c’est ce qui permet au voyageur de dire « je sais qu’il y a des travaux, donc je regarde si je suis peux m'y prendre autrement », et non pas « je suis pris au piège, maintenant, comment je m’adapte ?»).
Et ce n’est pas la page servant de blog de ligne qui permet de mieux s’organiser, puisqu’elle indique que le trafic est normal… jusqu’à ce qu’ils postent la survenance des travaux environ 4 semaines à l’avance. Alors que nous savons que l'information est disponible plusieurs mois avant avant la tenue des travaux. Nous vous laisserons juges de ce procédé.
Quelles alternatives aux coupures de soirée / week-end ?
Enfin, notre constat est que ces interruptions totales de trafic impactent toujours les mêmes : ceux qui travaillent en horaires décalés et qui ne sont pas motorisés pour rentrer chez eux : pour faire simple, la SNCF nous a indiqué que la moitié des utilisateurs des bus de substitution y ont recours au moins une fois par semaine.
Par conséquent, ne faudrait-il pas aussi s’interroger sur des scénarios alternatifs ? Citons entre, autres les scénarios suivants , que nous souhaitons voir a minima évalués :
- Si le RER était coupé au sud de Villeneuve, disons une semaine, pendant le mois d’août totalement, combien de soirées / week-ends de travaux pourrions nous économiser sur le reste de l’année ?
- Idem, des travaux auront lieu à Melun en 2024, quelles mutualisations de chantiers pourraient alors être envisagées ?
- Enfin, qu’est-ce qui empêche, par exemple comme ceci est réalisé en Suisse (cherchez « Cabride Suisse » sur Youtube pour vous en convaincre), d’avoir un nombre plus important de travaux menés en journée ? Les anciens se souviendront que le renouvellement des voies entre Melun et Montgeron au milieu des années 90 s’est réalisé en journée, pendant l’été. Donc pourquoi n’est-ce plus possible maintenant ?
En conclusion, vous l’aurez compris, notre sentiment est que le sujet travaux nous semble perfectible sur bien des aspects. Et tous les acteurs concernés par le sujet (même IDFM , qui au final donne l'impression de laisser faire le groupe SNCF, alors qu'ils sont l'autorité organisatrice des transports, rappelons-le) gagneraient à faire de réels efforts sur le sujet. Car c'est à l’enjeu de l'acceptabilité des travaux qu'il faut répondre. Et aujourd’hui, ce n’est clairement pas gagné…