Ce jour-là, lundi 19 juin 2017, était un jour de forte chaleur sur toute l’Ile-de-France. Depuis le milieu de la journée, les sections récemment en travaux sur la ligne avaient fait l’objet de limitations de vitesse, ce qui avait entraîné retards et suppressions depuis plusieurs heures.

Comme pratiquement tous les jours ouvrés, je fais ma dernière correspondance de la journée à Châtelet – Les Halles dans l’espoir de trouver un RER D qui me permette d’effectuer la 4e et dernière partie de mon trajet de retour. Il est 18h50.

Lorsque j'arrive sur le quai, c'est un train BUPE, pour Malesherbes, qui est en pole position à l’affichage. Ce train d'abord affiché "retardé" sur un écran, puis à "1 min" sur un autre, puis furtivement à "18h34", passe brusquement à un temps d'attente de 11 minutes. Avec un pareil saut, le voyageur, qu'il soit régulier ou occasionnel, ne peut avoir qu’un gros doute quant à la crédibilité des informations communiquées sur ces écrans: le train se serait-il perdu ? le conducteur aurait-il finalement fait demi-tour ?

Le compte à rebours démarre donc à 11 min… il progresse d'abord régulièrement, puis brutalement le décompte gagne plusieurs minutes. Finalement, c’est le miracle tant attendu, le train BUPE que le système nous a longtemps fait miroiter arrive en gare. Il est 18h58. Des voyageurs descendent, d’autres montent et le train finit normalement par repartir 3 minutes plus tard en direction de la gare suivante. 

Ainsi arrive-t-on à Gare de Lyon 3 minutes plus tard: il est 19h04. Là aussi, tout se passe comme d’habitude, là aussi certains voyageurs descendent, là aussi d’autres nettement plus nombreux montent… jusqu’à ce que survienne une annonce sonore de notre Simone nationale dans le train : le train est un ROVO, omnibus Corbeil par Ris-Orangis. Une mission assez éloignée du BUPE qui nous a été vendu à Châtelet - Les Halles, et qui était probablement encore en vente sur le quai de Gare de Lyon. Le conducteur confirme rapidement après le message automatique que « contrairement à ce qu’indique l’affichage » ce train est donc un ROVO.

Dès lors, tout s'accélère et il se passe ce qu’il devait se passer : un grand nombre de voyageurs dans le train veulent le quitter, et un autre grand nombre de voyageurs sur le quai veulent monter dans le train, le tout dans un temps qui pourrait être assez court. L’utilisateur habituel de la D pourra sans problème imaginer la scène se dérouler dans une grande confusion, des flux totalement désordonnés et des échanges de mots doux entre les voyageurs allant en sens opposé. Et ce d’autant que même après l’annonce du conducteur, le régulateur de flux continue à indiquer sur le quai que ce train va à Malesherbes.

Après pratiquement 3 minutes d’arrêt, pas mal d’échanges de voyageurs entre le quai et le train, entre le train et le quai, …, on finit par arriver à une situation permettant la fermeture des portes par le conducteur. Il est probable que certains voyageurs sur le quai n’ont même pas compris que le train qu'ils avaient devant eux était le ROVO qu’ils attendaient pour rentrer chez eux, on classera ces voyageurs dans les victimes de dommages collatéraux.

Pendant ce long arrêt, certains voyageurs en étaient à penser qu’  "on se fout[ait] de [leur] gueule", et il était difficile de leur donner tort.

Le train parti, il arriva 7 minutes plus tard à Maisons-Alfort. Et l’affichage sur le quai indiquait à nouveau ce train "à quai" comme un BUPE. Et l’agent de conduite a dû prendre la parole une nouvelle fois pour expliquer que « contrairement à ce qu’indique l’affichage, [etc.] »

 

Comment a-t-on pu en arriver là alors que les conditions de voyage étaient déjà difficiles en raison tant de la chaleur elle-même que de ses conséquences sur le fonctionnement de la ligne ?

 

Ce délitement de l’information voyageur se constate sur de nombreux points :

 

L’information voyageurs, qu’elle soit sonore ou par affichage, n’est pas, sur les lignes d’Ile-de-France et surtout sur la ligne D, un luxe. La situation est déjà si complexe normalement, et les exceptions au fonctionnement théorique si courantes, qu’on ne peut pas faire l’impasse dessus. On a vu avec ce pseudo-BUPE lundi soir que sa déficience peut avoir des conséquences importantes sur le fonctionnement de la ligne.

Certes, la SNCF nous promet des jours meilleurs en 2018 ou 2019 avec l’introduction du nouveau système d’information voyageur IENA (illustrations ci-dessous), mais il faut dès à présent que le maximum d’équipements soit remis en service et que les procédures soient adaptées pour assurer un fonctionnement « aussi bon que possible ».